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La santé Caraïbe

Analyse énergétique; principes de globalité.


Le système de représentation de la santé dans la médecine Créole est indissociable de la représentation populaire du monde et de l’univers. Tout évolue dans un subtil équilibre entre le chaud et le froid, et toute rupture de cet équilibre conduira au désordre, à la maladie et à la mort sans l’intervention du « Doktè-razié » et en cas d’échec de celui-ci, du Quimboiseur. Aujourd’hui, l’intervention obligée du médecin allopathe a remplacé celle du Guérisseur, a renforcé un phénomène d’automédication par les simples souvent mal maîtrisé , et n’a pas supprimé pour autant le recours au quimboiseur, en cas d’échec du médecin.

Il faudra alors rechercher la cause étiologique de ce déséquilibre énergétique soit dans la constitution trop chaude ou trop froide de l’individu et dans sa façon de réagir aux agressions extérieures, ce qui introduit des notions de tempérament, soit dans un réchauffement ou un refroidissement accidentel touchant à l’équilibre de cette constitution. Souvent l’alimentation entre en jeu, et sera mise en cause très sévèrement dans le cas d’un excès ou d’une carence de chaleur dans les organes. Une alimentation importée, les conserves, la farine blanche, est sans énergie, ne possède pas cette « fôss » que l’on retrouve dans les fruits frais, les racines, les légumes verts du pays, et donnera un corps « flô » (lymphatique), qui veut dire sans énergie, sans chaleur, chargé d’humidité. Le sang, qui a besoin de chaleur et qui en est le véhicule, se remplira de froid, d’humidité, et cette humidité se logera dans le cœur, les poumons, les articulations, dans le cerveau etc.…et le corps se remplira d’humeurs, de « Flüms »(mucosités ) et deviendra « glou » c’est à dire que les tissus seront remplis d’humidité. Froid et humidité seront éliminés par l’utilisation de plantes « chaudes », toniques, échauffantes, sudorifiques, et stimulantes.

D’une autre façon, un excès de chaleur dans le sang, échauffera les organes, déclenchant les syndrome de « linflamasion » littéralement l’inflammation, mais qui représente plus une maladie liée à l’ excès de chaleur dans l’organisme qu’un simple symptôme. Le travail excessif au soleil par exemple, échauffera le sang et provoquera une « linflamasion » qui pourra être externe et interne, s ‘étendant aux organes. Cette « linflamasion » se manifeste par des inflammations bucco pharyngées, des brûlures d’estomac, des douleurs abdominales, des inflammations urinaires, des éruptions cutanées. Les principaux traitements sont à base de tisanes rafraîchissantes qui rétabliront l’équilibre perdu.

Ces plantes seront en général utilisées en macération aqueuse qui sera bue toute au long de la journée.

Le traitement sera suivi d’une purge à base d’huile de Carapate ou palma-christi (ricinus communis).

Les tisanes et macérations sont rafraîchissantes par rapport au « thé » créole, «Thé» ou « dité » étant le terme par lequel on désigne aux Antilles une décoction de plantes chaudes .

Une nourriture trop chaude, un excès de cuisson, de fritures, de viandes cuites en sauces, de sel, d’épices, de sucre, affectent directement le sang créant un «san-sal »(sang chargé de toxines), qu’il faudra nettoyer par des plantes réputées froides.

Le sang peut aussi devenir sal après une « linflamasion » mal soignée. D’autres facteurs étiologiques peuvent intervenir comme l’âge et les infections, les parasitoses intestinales, etc... Ce « san-sal » se manifestera par des éruptions cutanées, furoncles, eczémas, prurits divers, écoulements purulents, des maladies du foie et de la vésicule biliaire, des maladies du cœur et des artères, l’inflammation des articulations, de l’hypertension etc.…quelque soit sa forme, il sera absolument nécessaire de rafraîchir l’organisme entier par voie interne et externe, par des cures prolongées de tisanes à base de plantes rafraîchissantes, de bains de feuillages, associés a une diète à base de salades vertes et de fruits. Ces fruits seront eux- mêmes choisis en fonction de leur classement énergétique chaud ou froid. Il est d’usage de rafraîchir régulièrement le corps à l’aide de tisanes et de bains rafraîchissants.

Une grande place est accordée ainsi à la prévention, qui exigera de la part de chacun un certain nombre d’attitudes et de comportements rigoureux pour se prémunir contre les échauffements, les refroidissements, et pour éviter le mauvais sort (par exemple en prenant soin de planter devant sa porte un pied de « épine du christ » (Euphorbia Milii), épineux évoquant la ronce qui formait la couronne du christ qui est sensé protéger la case contre les mauvaises influences dirigées contre ses habitants. On aura toujours aussi chez soi quelques feuilles de palmes (Cycas revoluta, cicadacées), qu’on brûlera en guise d’encens dans le cas d’un sentiment d’insécurité ou de danger proche. Ces croyances magico-religieuses sont répandues à quelques variantes près dans toutes les petites Antilles. Il nous faut rajouter une croyance commune à ces régions, celle qu’un incident apparemment anodin puisse être associé, juxtaposé à un autre phénomène d’ordre social, affectif ou autre, qui rejoint ce que les phénoménologues nomment la «synchronicité». Une branche sèche tombe d’un arbre et vous assomme : cela ne peut être du au hasard, et peut être déclenché à distance, même inconsciemment, par une pensée malveillante, un mal atteignant un proche, ou une trahison sentimentale ? cela entraînera en tous cas une réflexion de la victime qui pourra être très éloignée du fait constaté en lui-même. La victime ouvrira doublement les yeux sur la suite de son action, attendant confirmation ou infirmation, car  encore une fois, le hasard n’existe pas, et l’immanence des choses est la seule réalité.  Ici, l'intérieur et l'extérieur ne sont pas séparés. Le cosmos est en pérpétuelle collaboration avec les pensées des humains; par exemple, des propos tenus seront confirmés par un évènement extérieur s'ils exprime des vérités fondamentales: qu'une petite pluie concommitante vienne à tomber, qu'une crotte d'oiseau vous tombe sur le crâne, et au plus haut, qu'un orage innatendu se fasse entendre, et ce fait sera pris à haute voix comme témoin incontestable de la profondeur des vérités formulées; l'intervenant tendra le doigt dans un geste solennel en s'écriant "La vérité!" interdisant alors toute contestation au malheureux interpelé.

Chaque plante étant une entité à part entière et possédant sa " fôss ", il est évident qu’elles doivent être prescrites d’une " certaine façon" , qui ne laisse jamais d’étonner l’étranger trop cartésien, car ici on s’écarte de ce type d’analyse, et le rationnel n’est plus palpable : très souvent, c’est la façon de prescrire qui organise le succès du " rimèd-razié " ; les nombres impairs seront toujours respectés dans la posologie et la durée du traitement. Un bain par exemple devra être pris trois fois dans la même eau, au cours d’une même journée, et l’opération devra être renouvelée trois fois ! On observera de toujours frictionner un membre douloureux du haut vers le bas, et de l’intérieur vers l’extérieur. C’est dans ce sens que le mal s’en va. Dans les infusions prescrites contre " linflamasion " et les maladies " chaudes " en général, il faudra remplacer le sucre, qui « nourrit » la chaleur, par le sel, qui la fait "fondre "…et ne jamais oublier la phase lunaire propice à toutes les opérations. Il faut noter que parfois le choix du " rimèd razié " est simplement guidé par la vieille théorie de la signature, qui, même si elle demeure contestable dans ses fondements, n’en demeure pas moins vérifiable dans ses applications. Ainsi certaines plantes à fleurs rouges seront utilisées dans les affections du sang, comme "l’herbe tension ", (Justicia secunda, acanthacées).
Les tisanes constituent le mode d’utilisation le plus courant des plantes médicinales, suivant trois modalités, l’infusion, la décoction et la macération aqueuse . La décoction des plantes est appelée " thé " ou "dité" en créole, utilisée chaude, sucrée ou salée par opposition à la tisane consommée froide tout au long de la journée. Les autres formes d’utilisations sont les teintures alcooliques, les poudres de graines ou de la plante séchée, les pommades, les exsudations du suc des plantes fraîches, les bains, les cataplasmes, les sirops.



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